Quelles sont les mesures de protection ?

Les mesures de protection visent à protéger des personnes vulnérables, dont l’altération des facultés personnelles est attestée par un certificat médical établi par un médecin habilité.

Si aucune disposition moins contraignante n’est suffisante pour protéger la personne vulnérable (Cf. Quelles alternatives à une mesure de protection ?), il convient de faire une requête au juge des tutelles, afin d’envisager une mesure de protection.

Les mesures de protection, destinées à protéger la personne et/ou ses biens, sont de trois types :

  • la sauvegarde de justice,
  • la curatelle,
  • la tutelle.
La sauvegarde de justice

Objet

La sauvegarde de justice est une mesure de protection temporaire et souple. Elle apporte une réponse rapide au majeur atteint d’une altération provisoire de ses facultés ; elle est aussi souvent utilisée comme mesure « d’urgence » précédant la mise en place (qui peut être longue) d’une tutelle ou curatelle.

Elle permet d’apporter immédiatement un minimum de sécurité avec un régime de courte durée. Elle permet de protéger la personne contre des actes qu’elle aurait accomplis ou au contraire négligé d’accomplir, tout en gardant sa capacité juridique et la possibilité d’organiser la gestion de ses intérêts.

Personnes concernées

La sauvegarde de justice a été conçue pour des personnes majeures :

  • souffrant temporairement d'une incapacité (ex : coma, traumatismes crâniens),
  • ou dont les facultés sont durablement atteintes (facultés mentales ou facultés corporelles empêchant l'expression de leur volonté) et qui ont besoin d'une protection immédiate pendant l'instruction de la demande aux fins de mise en place d'une mesure plus protectrice (tutelle ou curatelle),
  • ou dont les facultés sont altérées et pour lesquelles une solution moins contraignante suffit en temps normal (par exemple : une procuration), mais qui ont besoin ponctuellement d'être représentées pour certains actes déterminés (par exemple : une vente immobilière).

Trois types de mesures avec des procédures distinctes

Il existe trois types de mesure de sauvegarde de justice avec chacune leur procédure propre :

  • la sauvegarde de justice par voie médicale,
  • la sauvegarde de justice pour la durée de l’instance,
  • la sauvegarde de justice rénovée.

 

  • Sauvegarde de justice médicale

A l’occasion d’une hospitalisation dans un établissement public ou privé, administrant des soins pour troubles mentaux, le médecin doit, s’il constate qu’une personne a besoin d’être protégée, en faire la déclaration au Procureur de la république.

La déclaration est faite soit par le médecin traitant de la personne (avec un l’avis conforme d’un psychiatre), soit par le médecin de l’établissement de santé où elle se trouve.

Cette mesure peut prendre fin, soit parce que le médecin fait une nouvelle déclaration au procureur en attestant que la situation s’est améliorée, soit à l’expiration du délai d’un an.

Elle peut, toutefois, être renouvelée pour une nouvelle durée d’un an.

  • Sauvegarde de justice pour la durée de l’instance

Le juge des tutelles saisi d’une demande de mesure de protection peut toujours prononcer une mesure de sauvegarde de justice, jusqu’à ce qu’il se prononce sur la demande.

Dans ce cas de figure, la personne doit être auditionnée sous réserve de l’urgence. Une dispense d’audition est possible sur certificat médical, si la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté ou si l’audition peut porter atteinte à sa santé.

La durée de cette sauvegarde de justice ne peut excéder un an.

  • Sauvegarde de justice rénovée

La sauvegarde de justice peut également être prononcée comme une mesure à part entière lorsque le juge constate que la personne a besoin d’une protection juridique temporaire ou d’être représentée pour l’accomplissement de certains actes déterminés.

Elle évite le prononcé d’une mesure de protection de type tutelle ou curatelle. Elle ne peut être prononcée qu’après l’audition de la personne concernée sauf avec dérogation médicale.

Le juge désigne un mandataire spécial auquel il confie l’accomplissement d’actes d'administration ou de disposition du patrimoine, ainsi que des actes importants touchant à la protection de la personne.

Cette sauvegarde de justice permet à une famille qui s’entend bien et qui s’est organisée dans la prise en charge d’une personne fragile de ne pas recourir à la mesure lourde et longue de la tutelle uniquement pour accomplir un acte qui ne peut s’effectuer en raison de l’inaptitude du majeur à apposer sa signature (vente d’un bien, déblocage d’un placement, acceptation d’une succession…).

Le mandataire devra informer le juge qu’il a accompli le/les actes pour lesquels il a été nommé. Le juge vérifiera que le mandat a bien été respecté et la mesure prendra fin.

Cette sauvegarde peut couvrir jusqu’à un an, renouvelable pour un an maximum.

Qui peut faire une demande de sauvegarde de justice par voie judiciaire ?

La demande peut être faite au juge des tutelles par :

  • la personne à protéger elle-même, ou la personne avec qui elle vit en couple,
  • un membre de sa famille, des proches entretenant des relations étroites et stables avec elle,
  • la personne qui exerce (déjà) sa mesure de protection juridique,
  • le procureur de la République[1], qui formule cette demande soit de sa propre initiative, soit à la demande d'un tiers (par exemple : médecin, directeur d'établissement de santé, travailleur social).

La demande doit comporter le certificat médical circonstancié établissant l'altération des facultés de la personne, l'identité de la personne à protéger, l'énoncé des faits qui appellent cette protection.

Effet de la mesure

La personne garde la capacité d'accomplir tous les actes de la vie civile, sauf ceux confiés au mandataire spécial, s'il a été nommé.

La personne en sauvegarde de justice ne peut divorcer par consentement mutuel ou accepté.

La sauvegarde permet de contester des actes que le majeur aurait passés pendant la sauvegarde de justice et qui seraient contraires à ses intérêts. Ces actes pourront être annulés ou corrigés.

Durée et fin de la mesure

La sauvegarde de justice ne peut dépasser 1 an, renouvelable une fois sur décision du juge des tutelles. La durée totale ne peut excéder 2 ans.

La fin de la sauvegarde de justice a lieu :

  • soit à l'expiration du délai,
  • soit après l'accomplissement des actes pour lesquels elle a été ordonnée (sur décision du juge),
  • soit lorsque le majeur reprend possession de ses facultés (sur décision du juge),
  • soit par l'ouverture d'une mesure de curatelle ou de tutelle,
  • soit par le décès de la personne protégée.

[1] Exclusivement concernant la sauvegarde médicale

La curatelle

Objet

Le régime de la curatelle se préoccupe des majeurs qui, sans être hors d’état d’agir eux-mêmes, ont besoin d’être conseillés et contrôlés dans les actes de la vie civile. Le curateur ne doit pas se substituer à la personne en curatelle pour agir en son nom : c’est un “faire avec” qui prédomine dans l’exercice de cette mesure, la collaboration étant indispensable.

La curatelle n'est prononcée que s'il est établi que la mesure de sauvegarde de justice serait une protection insuffisante. Il existe plusieurs degrés de curatelle.

Elle est prononcée pour une durée maximum de 5 ans et peut être renouvelée pour une durée supérieure.

Trois degrés de curatelle

Le régime sera adapté aux capacités du majeur et le juge allégera ou aggravera la curatelle, en prononçant une mesure de curatelle simple, renforcée ou aménagée.

  • Curatelle simple

Le majeur protégé dispose de la libre gestion de ses ressources et continue ainsi à faire fonctionner seul son compte courant. Il conserve ses moyens de paiement (carte bancaire, chéquier…).

Par contre, pour tous les actes susceptibles de porter atteinte à son patrimoine le consentement du curateur est obligatoire (placement de fonds, déplacement de fonds, vente de bien, succession, emprunt…).

  • Curatelle renforcée

Outre les dispositions énoncées dans la curatelle simple concernant les actes de disposition, le curateur perçoit seul les revenus de la personne, sur un compte ouvert au nom du majeur protégé.

Il assure lui-même le règlement des dépenses auprès des tiers et dépose l’excédent sur un compte laissé à la disposition de l’intéressé.

Le majeur protégé peut disposer d’une carte bancaire. Le plafond de retrait est défini conjointement entre la personne protégée et le curateur en fonction du budget, des besoins et du degré d’autonomie.

Le curateur assure la constitution des dossiers et le suivi des droits administratifs, il gère le recouvrement des créances le cas échéant, il assiste le majeur protégé au cours des procédures judiciaires.

  • Curatelle aménagée

Le juge peut également aménager une curatelle : il énumérera certains actes que la personne protégée aura la capacité à faire seule ou d’autres pour lesquels l’assistance du curateur sera nécessaire. Ils seront précisés soit dans le jugement d’ouverture de la curatelle, soit dans une décision modificative.

Qui peut faire une demande de curatelle et comment ?

L'ouverture d'une curatelle ne peut être demandée au juge des tutelles que par certaines personnes :

  • la personne à protéger elle-même, ou la personne avec qui elle vit en couple,
  • un membre de sa famille, des proches entretenant des relations étroites et stables avec elle,
  • la personne qui exerce (déjà) sa mesure de protection juridique,
  • le procureur de la République, qui formule cette demande soit de sa propre initiative, soit à la demande d'un tiers (ex : médecin, directeur d'établissement de santé, travailleur social).

La demande doit comporter le certificat médical circonstancié (rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le Procureur de la République) établissant l'altération des facultés de la personne, l'identité de la personne à protéger, ainsi que l’énoncé des faits qui appellent cette protection.

Elle est adressée au juge des tutelles dont dépend le lieu de résidence du majeur à protéger, ou de celui de son tuteur si le majeur bénéficie déjà d'une mesure de tutelle suivie par le juge dans le ressort duquel réside le tuteur.

Procédure

Après audition du majeur à protéger et examen de la requête, le juge nomme un curateur ou plusieurs curateurs (possibilité de diviser la mesure de protection entre la protection de la personne et la protection des biens). Le juge désigne le curateur en priorité parmi les proches de la personne à protéger. Sinon, il désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, professionnel inscrit sur une liste dressée et tenue à jour par le préfet.

Le juge peut éventuellement désigner un subrogé curateur pour surveiller les actes passés par le curateur, ou le remplacer en cas de conflit d'intérêt. Le juge peut aussi, en l’absence de subrogé tuteur, désigner un curateur ad hoc (notamment s'il y a conflit d'intérêt entre le curateur et la personne protégée).

Le curateur doit rendre compte de l'exécution de son mandat à la personne protégée et au juge. En cas de curatelle renforcée, il doit remettre chaque année au greffier en chef du tribunal d'instance un compte rendu de sa gestion.

Effets de la mesure

  • Protection de la personne

Une personne protégée par une curatelle prend seule les décisions relatives à sa personne (ex : se déplacer, changer d'emploi) dans la mesure où son état le permet.

Elle peut choisir son lieu de résidence et entretenir librement des relations personnelles. Elle conserve le droit de vote.

Elle accomplit seule certains actes dits "strictement personnels" (comme la reconnaissance d'un enfant).

En revanche, elle doit obtenir l'autorisation du curateur, ou à défaut celle du juge, pour se marier. Elle ne peut conclure un pacte civil de solidarité (Pacs) sans l’assistance de son curateur.

Lorsque le majeur se met en danger du fait de son comportement, le curateur peut prendre les mesures de protection strictement nécessaires pour y mettre fin, il doit en informer le juge.

  • Protection des biens

La personne en curatelle peut (sauf exceptions) accomplir seule les actes d'administration (par exemple : effectuer des travaux d'entretien dans son logement).

Pour accomplir les actes de disposition, l’assistance de son curateur est nécessaire (par exemple : vendre un appartement).

Elle peut rédiger un testament seule, et peut faire des donations avec l'assistance de son curateur.

En cas de curatelle renforcée, le curateur perçoit les revenus de la personne protégée, il est chargé de régler les dépenses de celle-ci auprès des tiers et lui reverse l'excédent.

Durée et fin de la mesure

La mesure de curatelle est mise en place initialement pour une durée fixée par le juge des tutelles, sans qu'elle puisse excéder 5 ans. Lors du réexamen, le Juge peut la renouveler pour une durée plus longue (jusqu’à 20 ans) si le médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République constate que l’altération des facultés du majeur protégé n’est pas susceptible de connaitre une amélioration. (art. 442 du code civil).

La curatelle prend fin dans les cas suivants :

  • sur décision du juge s’il estime qu’elle n’est plus nécessaire, à la demande du majeur ou de toute personne habilitée à demander une mise sous curatelle, après avis médical constatant que la protection n'est plus nécessaire,
  • à l'expiration de la durée fixée, en l'absence de renouvellement,
  • si une mesure de tutelle est prononcée en remplacement de la curatelle,
  • au décès de la personne protégée.
La tutelle

Objet

La tutelle est le régime de protection le plus contraignant : la personne, en raison de l’altération de ses facultés mentales ou corporelles empêchant l’expression de sa volonté, a besoin d’être représentée de manière continue dans les actes de la vie civile.

La tutelle n’est prononcée que s’il est établi que la mesure de curatelle ne suffit pas à protéger la personne et/ou ses biens. Le Juge peut aménager une tutelle en l’allégeant : il énumérera (dans le jugement d’ouverture ou dans une décision modificative) certains actes que la personne protégée aura la capacité de faire elle-même.

Qui peut faire une demande de tutelle et comment ?

L'ouverture d'une mesure de tutelle ne peut être demandée au juge que par certaines personnes :

  • la personne à protéger elle-même, ou la personne avec qui elle vit en couple,
  • un membre de sa famille, des proches entretenant des relations étroites et stables avec elle,
  • la personne qui exerce (déjà) sa mesure de protection juridique,
  • le procureur de la République, qui formule cette demande soit de sa propre initiative, soit à la demande d'un tiers (par exemple : médecin, directeur d'établissement de santé, travailleur social).

La demande doit comporter le certificat médical circonstancié (rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le Procureur de la République) établissant l'altération des facultés de la personne, l'identité de la personne à protéger, ainsi que l’énoncé des faits qui appellent cette protection.

Elle est adressée au juge des tutelles dont dépend le lieu de résidence du majeur à protéger.

Effets de la mesure

Après audition du majeur et examen de la requête, le juge peut nommer un ou plusieurs tuteurs (l’un pour la protection de la personne, l’autre pour la protection des biens), ou désigner un tuteur et un co-tuteur.

Le juge choisit le tuteur en priorité parmi les proches de la personne à protéger. En cas d’impossibilité, il désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, professionnel inscrit sur une liste dressée et tenue à jour par le préfet.

Le juge peut également désigner un subrogé tuteur pour surveiller les actes passés par le tuteur, ou le remplacer en cas de conflit d'intérêt. Le juge peut aussi désigner en l’absence de subrogé tuteur un tuteur ad hoc.

  • Le rôle du tuteur

Le tuteur accomplit seul les actes d’administration, c'est-à-dire la gestion courante (ouverture et gestion d’un compte courant, règlement des charges, constitution des dossiers administratifs…).

En revanche pour tous les actes de disposition, c'est-à-dire les actes ayant pour effet de modifier la valeur du patrimoine (placement de fonds, déplacement de fonds, vente d’un bien…), il devra obtenir l’autorisation du juge des tutelles.

Le tuteur est tenu d’être informé par tous les organismes (administratifs, judiciaires, médicaux, bancaires…) de la situation de la personne protégée pour agir en son nom et dans ses intérêts. Le secret professionnel et médical n’est pas opposable au tuteur ; il a accès au dossier médical du majeur protégé.

En matière médicale, le tuteur est amené à consentir aux soins avec ou en lieu et place de la personne protégée si celle-ci ne peut plus s’exprimer du tout. En cas de refus de soin clairement exprimé par la personne protégée, il appartient au médecin d’appliquer les mêmes règles que pour toute autre personne.

Le tuteur est tenu de rendre compte de l'exécution de son mandat à la personne protégée et au juge.

  • Les droits de la personne protégée

La personne sous tutelle n’en demeure pas moins un titulaire de droits. La mesure s’exerce dans l’intérêt exclusif de la personne devenue majeure et ne constitue pas un prolongement de la minorité.

Dans cette optique, certains actes dépendent de la seule volonté de la personne protégée et ne relèvent d’aucune représentation : actes relatifs à l’autorité parentale, à la filiation, actes médicaux, choix du lieu de résidence, des relations personnelles, rédaction ou révocation d’un testament...

Le majeur protégé possède toujours le droit d’exercer les actes de la vie courante, qu’il soit onéreux ou à titre gratuit (liberté d’utiliser une somme d’argent de poche, possibilité de faire des cadeaux d’usage…).

Actes d’administration Actes de disposition Actes à caractère personnel
Tuteur Tuteur + Juge des tutelles Majeur protégé seul

Actes d’administration : Actes de gestion courante. Ils s'opposent aux actes de vente, de cession gratuite, de perte ou de destruction.

Actes de disposition : Actes qui engagent le patrimoine d'une personne, pour le présent ou l'avenir. Ces actes graves entraînent une transmission de droits qui peuvent diminuer la valeur du patrimoine.

Des exemples de ces actes sont listés dans un décret : Décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle.

Durée et fin de la mesure

La mesure de tutelle est prononcée initialement pour une durée fixée par le juge des tutelles, sans qu'elle puisse excéder 5 ans, voire 10 ans si le médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République constate d’emblée que l’altération des facultés du majeur protégé n’est pas susceptible de connaitre une amélioration.

Lors du réexamen, le juge peut la renouveler pour une durée allant jusqu’à 20 ans, si le médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République constate que l’altération des facultés du majeur protégé n’est pas susceptible de connaitre une amélioration. (art. 442 du code civil).